[DROIT SOCIAL] Publication du décret sur la mise en œuvre de la présomption de démission pour abandon de poste : la fin de la tactique de l’abandon de poste ?

[DROIT SOCIAL] Publication du décret sur la mise en œuvre de la présomption de démission pour abandon de poste : la fin de la tactique de l’abandon de poste ?
18/04/2023 , 05h56 Droit Social

Après la création de l’article L 1237-1-1 du Code du travail en décembre 2022 par la Loi Marché du Travail, le décret d’application vient insérer l’article R 1237-13 dans le Code du travail, dont leur objectif est d’éradiquer la pratique par laquelle des salariés usent de l’abandon de poste pour être licencié et bénéficier des indemnités chômage.

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Le décret d’application vient encadrer la procédure de mise en œuvre de la présomption de démission pour abandon de poste. Cette procédure nécessite une mise en demeure du salarié, par lettre recommandée ou remise en main propre contre décharge, de justifier de la raison de son absence et de reprendre son poste sous un délai indiqué dans la mise en demeure.

Ce délai fixé par l’employeur ne pourra pas être inférieur à 15 jours calendaires et débutera à compter de la présentation de la mise en demeure au salarié.

Le salarié disposera du délai fixé pour répondre à la mise en demeure et faire tomber la présomption de démission en justifiant de son absence ou en reprenant son poste.

Ce dispositif sera applicable à compter du 19 avril 2023.

 

  1. La procédure de mise en œuvre par l’employeur

 

L’article L 1237-1-1 du Code du travail fixe les différentes conditions permettant de caractériser la situation de présomption de démission pour abandon de poste par le salarié.

L’article R 1237-13 du Code du travail prévoit, quant à lui, la procédure à respecter par l’employeur souhaitant se prévaloir de la présomption de démission pour abandon de poste volontaire par le salarié.

À ce titre, l’employeur doit dans un premier temps mettre en demeure le salarié de justifier de son absence et de reprendre son poste. Cette mise en demeure du salarié doit se faire par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge.

La mise en demeure aura pour objet d’enjoindre le salarié à justifier de son absence et de reprendre son poste sous le délai fixé par l’employeur qui doit être au minimum de 15 jours calendaires (y compris week-end et jours fériés) à compter de la date de présentation de la mise en demeure au salarié.

L’employeur a la possibilité également de préciser au sein de la mise en demeure, les conséquences encourues par le salarié, s’il ne justifie pas de son absence, à savoir la rupture de son contrat de travail assortie ou non de l’exécution d’un préavis (règles classiques applicables à la démission).

  1. Le droit de réponse accordé au salarié

 

L’article L 1237-1-1 du Code du travail prévoit la possibilité pour le salarié de contester le recours de l’employeur à la présomption de démission pour abandon de poste devant le Conseil de prud’hommes. Les textes prévoient, la possibilité pour le salarié de justifier son absence et d’éviter d’être considéré comme démissionnaire.

En effet, par la mise en demeure, l’employeur enclenche une présomption de démission, présomption qui peut être contredite par le salarié en justifiant de son absence et en reprenant son poste dans le délai fixé par l’employeur dans la mise en demeure.

Le décret indique également des motifs permettant notamment au salarié de justifier de son absence :

  • Raison médicale
  • Exercice de son droit de retrait
  • Exercice de son droit de grève
  • Refus d’exécuter une instruction contraire à une règlementation
  • Refus de la modification du contrat de travail

Ainsi, ce motif d’absence devra être indiqué et justifié par le salarié dans sa réponse à la mise en demeure, dans le délai imparti par l’employeur. Si l’absence du salarié est bien justifiée dans le délai imparti, celui-ci ne pourra pas être considéré comme démissionnaire par son employeur, la rupture du contrat de travail ne pourra alors pas intervenir.

Le salarié dispose également de la possibilité de répondre à la mise en demeure de l’employeur en lui indiquant qu’il ne souhaite pas reprendre son poste. Dans ce cas, le salarié sera qualifié de démissionnaire.

En l’absence de réponse du salarié à la mise en demeure et de reprise du travail dans le délai imparti, le salarié sera considéré comme démissionnaire.

  1. Conséquences sur la rupture de la relation de travail

 

Dans l’hypothèse d’absence de réponse du salarié à la mise en demeure qui lui a été adressée par son employeur, ce dernier pourra poursuivre la procédure de rupture du contrat de travail.

À ce titre, l’employeur ne procédera plus à un licenciement pour faute, le salarié sera déclaré démissionnaire et il ne pourra pas bénéficier des indemnités chômage.

La démission du salarié doit être appréciée par l’employeur à l’expiration du délai laissé au salarié pour justifier de son absence et reprendre son poste.

Les règles de droit commun du préavis s’appliquent.

Comme pour toute démission, l’employeur devra respecter son obligation de laisser à la disposition du salarié ses documents de fin de contrat.

Le salarié pourra bénéficier d’une indemnité compensatrice de congés payés, s’il dispose de congés non pris à la date de la démission.

Enfin, si le salarié estime que la présomption de démission pour abandon de poste a été appliquée à tort par l’employeur, le salarié à la possibilité d’en contester l’usage directement devant le Bureau de jugement du Conseil de prud’hommes, ce dernier devant statuer dans un délai d’un mois.