Aménager une condamnation judiciaire à payer une somme d’argent et obtenir des délais de grâce

Aménager une condamnation judiciaire à payer une somme d’argent et obtenir des délais de grâce
01/01/2018 , 05h08 Contentieux commercial

La condamnation en paiement en vertu d’une décision de justice exécutoire n’en demeure pas moins aménageable par le jeu de mécanismes juridiques spécifiques – focus sur l’obtention de délais de paiement par la partie condamnée.

Le Code civil n’ignore pas les difficultés que sont susceptibles de rencontrer tant les particuliers que les entreprises pour payer leurs dettes, qu’elles concernent des dettes fournisseurs, des dettes bancaires, fiscales ou sociales. Au contraire, il prévoit que tout débiteur en situation de trésorerie tendue puisse solliciter auprès d’un juge des délais pour désintéresser ses créanciers et ainsi préserver sa viabilité financière.

L’article 1343-5 du Code civil alinéa 1er dispose ainsi que « le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues (…) ».

Si ce texte a vocation à s’appliquer régulièrement en faveur d’un débiteur dont l’obligation de paiement est exigible ou dont la condamnation est définitive, il est parfois oublié qu’une personne physique ou morale condamnée en paiement par une décision de justice exécutoire mais dont il est interjeté appel peut également obtenir un aménagement dans les modalités d’exécution de sa condamnation.

Trois voies s’offrent au débiteur pour obtenir des délais de grâce :

  • Le juge de droit commun (juge des référés ou juge du fond) – Un pouvoir de report ou d’échelonnement de la dette.

En cas d’urgence et avant tout acte d’exécution pratiqué par le créancier en vertu d’une décision de justice, le débiteur peut s’adresser au juge des référés ou le juge du fond afin que celui-ci lui octroie des délais dans les conditions de l’article 1343-5 précité du Code civil, isolément ou dans le cadre d’une demande reconventionnelle présentée lors de l’action en paiement.

Le juge compétent est le Tribunal de commerce pour les commerçants, le Tribunal d’instance ou de Grande instance au-delà d’un seuil de compétence (10.000 euros) pour les litiges impliquant un particulier ;

  • Le juge de l’exécution – Un pouvoir de réduction des intérêts ou d’octroi de délais de paiement.

Une partie condamnée au paiement par un tribunal pourra s’adresser au juge de l’exécution dès lors que son créancier lui aura fait parvenir un commandement de payer ou aura pratiqué un acte d’exécution forcée de la décision. Le juge de l’exécution sera alors seul compétent pour ordonner une réduction des intérêts ou octroyer au débiteur des délais de paiement, ou encore une exonération de la majoration du taux d’intérêt légal. Le bénéfice de ces mesures pour le débiteur n’est pas de droit et répond à une appréciation par le juge de sa situation, tant personnelle que financière, ainsi que des besoins du créancier ;

  • Le Premier président de la Cour d’appel – Un pouvoir d’aménagement.

Le Code de procédure civile octroie la possibilité pour une partie condamnée au paiement en première instance, de saisir le Premier Président de la Cour d’appel qui pourra, sous certaines conditions, (i) décider que les sommes dues donneront plutôt lieu à la constitution d’une garantie, personnelle ou réelle, (ii) ordonner la consignation des sommes entre les mains d’un tiers, (iii) ou encore dire qu’à ces mesures pourra être substituée toute garantie équivalente et opportune.

L’obtention de ces aménagements suppose la démonstration de ce que l’exécution de la décision de justice risque d’entrainer des conséquences manifestement excessives pour le débiteur ou ne permettrait pas de récupérer les fonds si le créancier voyait finalement sa décision remise en cause en appel.


Il faut en rappeler en conclusion que le créancier avisé n’ignore pas ses facultés offertes au débiteur et qu’un accord amiable peut être obtenu en vue d’un échelonnement des créances pour éviter un contentieux ou des saisies infructueuses.